2017, la mère LePen arrive au pouvoir avec 50,41% des voix. BFM, I-Télé, France 2 et tous ces traîne-savates s'en donnent à cœur joie, l'audience va être bonne. Voilà comment un pays comme la France a réussi la prouesse de laisser gagner un parti qui a piqué son logo au MSI, le parti Italien des potes de Mussolini. La BD va dérouler le tapis rouge et nous dévoiler comment vont se passer les premiers mois de cette femme à la tête de notre pays.
Auteur : François Durpaire
Dessins : Farid Boudjellal
Editions : Les Arènes
Malgré tout, j'ai trouvé cette BD médiocre. Seule les premières pages, c'est à dire jusqu'à l'arrivée de Marine à L'Elysée, m'ont semblé bonnes. L'organigramme des ministres du gouvernement fait froid dans le dos. Mais la fracture avait déjà commencé dans mon esprit en voyant les réactions individuelles des autres candidats à cette présidentielle. Sérieusement, vous imaginez Jean-Luc Mélenchon quitter la lutte aussi facilement, à la manière d'un Jospin qui ne s'en remet pas ? Vaste blague, c'est la réaction contraire qui arriverait.
En feuilletant La Présidente avant de l'acheter, je m'attendais à tomber sur quelque chose de sérieux car rien n'est plus sérieux que ce qui va se passer en 2017. Et c'est justement parce que le sujet est important que sa manière de le traiter doit l'être aussi. Autrement, autant faire un traitement grotesque et humoristique qui pourrait d'ailleurs être génial et puissant. Ici, je pensais que le bouquin allait faire beaucoup plus référence au programme du front national et allait projeter cette ombre sur notre réalité. C'est le cas sur quelques paragraphes du programme par-ci par-là , mais tout est accès sur ce qui bien sûr fait peur et fait vendre : le sort de ces gens qui ont eu la mauvaise idée d'être nés avec une peau un peu trop foncée. Et puis la petite pastille sur la couverture "Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas" ne prend pas en compte le fait que depuis la nuit des temps, les gens élisent des présidents sans lire leur programme.
C'est quoi cette lumière verte ? Tu n'as pas éteint ta webcam ?
Tout au long de l'histoire, on suit une famille dont Antoinette la grand-mère est une ancienne militante (Antoinette, même le prénom est copieusement choisi), Stéphane son petit-fils, Tariq son pote arabe et Fati sa copine Sénégalaise. Et tout y passera. Le retour au bercail de Fati un 17 décembre car sa carte de séjour arrive à son terme... en plein milieu de son année d'étude en droit... sérieusement ? La surveillance et l'arrestation du pote arabe grâce à Skype et sa webcam à cause d'un blog... vraiment ? La mort d'Antoinette le même jour que celle du cyclope... celle-là c'était vraiment trop. Et ça commence à faire beaucoup trop de points de suspension. C'est en gros la famille de la mixité de Belleville à qui il va arriver toutes les horreurs possibles et imaginables.
La simulation économique projetée me semble aussi grossière. Retour au Franc = dévaluation de la monnaie = baisse voire fuite des investissements = chômage. Mhum, je n'y crois pas une seconde. Et c'est pas parce que DSK raconte ça chez Bourdin que c'est suffisant. Tant de choses et de secteurs sont oubliés dans ce livre où rien n'est approfondit. Pas un mot de l'agriculture, pas un mot des résultats de la sortie de l'Union Européenne, pas un mot de la transition énergétique. Le combat face à Merkel semble perdu d'avance. Leur discours tient en quelques phrases et ne ressemble en rien à un débat intelligent. On à l'impression de voir deux gamines qui se bagarrent le dernier Papi Brossard posé sur la table du salon. Tout est axé sur le nationalisme poussant même le retour des affrontements de la Nouvelle-Calédonie qui avait déjà entraîné un Etat d'urgence en 1985. Sans compter les dernières pages qui nous laissent littéralement crever la dalle.
- Oh fait, on fait quoi de l'emmerdeuse ?
- Ma nièce ? On la remet à l'école, c'est de son âge !
Je pensais lire une simulation réaliste, approfondie et je tombe sur un truc manichéen et trop subjectif. Je m'attendais à trouver une BD qui allait démonter implacablement les arguments du programme du FN les uns après les autres (comme le salaire parental, l'IVG, la peine de mort, le vide dans sa gestion économique) et je me retrouve face à un monologue de bistrot couché en BD. Et c'est là tout le problème : car la position personnelle et assumée de l'auteur justifie à elle seule la pensée inverse. Au lieu de démonter méthodiquement (voire mathématiquement !) les lignes principales du FN, il en donne un avis tranché qui en conséquent fait exister l'avis tranché inverse. Une démonstration appuyée peut convaincre et enterrer, pas un point de vue personnel. Car s'il a le mérite et la légitimité d'exister, son contraire le peut également.
Je me retrouve aussi face à un vide abyssal lorsque j'aimerais trouver ce même genre de projection pour les autres candidats. A quand une BD qui simulerait le programme de La France Insoumise par exemple ? Pourquoi cette fixation sur le FN qui finalement contribue encore une fois à retrouver sa tronche dans les vitrines de nos librairies ? Faut faire gaffe, car comme pour Beetlejuice, si on prononce son nom trop souvent, elle finira par apparaître pour de bon.
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